Louis Appia (1818-1898)

Louis Appia en 1859

Louis Appia est né le 13 octobre 1818 à Hanau près de Francfort. Il était le fils aîné de Paul Appia et Caroline Develay.
En 1836, après le collège à Francfort, il vint à Genève où il suivit la classe préparatoire de l’Académie et passe baccalauréat es lettres en 1837 et celui de sciences en 1838. Se décidant à faire des études de médecine, en 1838 il alla à l’université de Heidelberg. Et à vingt-cinq ans, en mars 1842, il y décrocha son doctorat en médecine.

Après ses études à Heidelberg, il retourna à Francfort où il obtint le droit de pratiquer et il soigna les plus démunis. Sa spécialité étant l’ophtalmologie, en 1844 il y fonda avec deux confrères un dispensaire ophtalmologique.

En 1847, il retourna à Genève pour prendre soin de ses grands-parents alors que la situation était tendue en Suisse en raison de la guerre du Sonderbund. Il poursuivit ensuite sa route vers Paris. Et c’est 1848 que Louis aida à soigner les blessés de la révolution française de Février et de la révolution de Mars en Allemagne.

En 1849, après la mort de son père et l’échec de la révolution en Allemagne, Louis quitta Francfort avec sa mère et son frère Georges. La famille vint s’établir à Genève, qui était de longue date un lieu d’accueil et de formation des membres de la famille Appia. Louis y retrouva ses sœurs Marie et Cécile qui y résidaient déjà.

Louis ouvra d’abord un cabinet dans la campagne Genevoise, près de Jussy, où il fut très apprécié. Ensuite il se déplaça dans le quartier neuf de Malagnou et c’est là qu’il rencontra Anna Lasserre (1834-1886), descendante d’une famille protestante réfugiée à Genève.

En 1853, il l’épousa et tous deux allèrent s’installer en ville de Genève près de la cathédrale de Saint-Pierre. Ils eurent quatre enfants : Paul (1856-1925), Hélène (1858-1944), Marie (1860-1914) et Adolphe (1862-1928), qui devint un metteur en scène de renom.

Bien que Louis et Anna ont eu quatre enfants, cette branche de la famille resta sans postérité. En effet, Paul fut le seul qui eut une descendance. Il se maria avec Olympe Laugt et ils eurent une seule fille, mais celle-ci resta célibataire et n’eut pas d’enfant. De l’époque de son mariage date l’amitié étroite de Louis avec le chirurgien Théodore Maunoir qui avait étudié la médecine en Angleterre et en France. Sur ses conseils, Appia s’affilie aux Sociétés médicales de Genève et de Neuchâtel et à la Société genevoise d’utilité publique. En 1855, les terribles récits provenant de la guerre de Crimée poussent les deux médecins à se préoccuper activement de la souffrance des soldats. Louis s’occupe de sa clientèle privée, mais sa foi et ses sentiments de responsabilité envers les souffrances humaines le poussent à aider activement les personnes dans le besoin. En 1858 après l’attentat d’Orsini, Louis se hâte d’écrire un traité sur les blessures causées par les armes à feu.

En mai 1859, après avoir reçu une lettre de son frère Georges, Louis fait paraître une note dans le journal de Genève pour collecter de la charpie pour les blessés en Italie. Ensuite il décide de partir pour l’Italie afin de soigner les blessés de cette guerre. Alexis François écrit : « Ce voyage d’Appia en Italie est une date importante dans l’histoire de la Croix-Rouge. Il marque l’apparition désintéressée sur le champ de bataille d’un médecin civil qui s’est longuement préparé à sa nouvelle tâche dans le temps de paix. Appia représente aussi, au plus haut degré, l’amélioration du sort des blessés par le perfectionnement du matériel d’ambulance ». Lors de son périple qui le mène jusqu’à Solférino, il distribue des exemplaires de son premier traité sur les blessures causées par les armes à feu et il envoie une série de lettres à son collègue Maunoir racontant ses expériences sur le soin des blessés. De retour à Genève, Louis publie une nouvelle version de son traité auquel il adjoint ces lettres.

Comme Henry Dunant, Louis reçoit ensuite plusieurs décorations qui vinrent récompenser son dévouement.

En 1860, Louis Appia est admis à la bourgeoisie de Genève. Louis continue à œuvrer au sein de nombreuses sociétés philanthropiques, religieuses et d’intérêt public. Les années qui suivirent, il donna des conférences pour promouvoir l’hygiène publique et les soins aux enfants, montrer les gestes qui sauvent, combattre l’alcoolisme au sein des classes défavorisées. Il continue aussi ses travaux sur la chirurgie militaire et en 1862, il gagne un prix à l’Académie de Naples.

Louis Appia et Henry Dunant se demandent alors s’il n’y aurait pas moyen, dès le temps de paix, de constituer des sociétés dont le but serait de faire donner des soins aux blessés en temps de guerre. Ces idées furent ensuite partagées par le Général Dufour et par Maunoir. La publication du livre de Dunant, Un souvenir de Solférino, eut un retentissement international et donna une grande impulsion à l’application pratique de ces idées. Au début 1863, la Société genevoise d’utilité publique créa une commission d’étude pour étudier un projet pour mettre en pratique les idées d’aide aux blessés de Dunant et Appia. Cette commission comprenait 5 hommes : le général Dufour, Louis Appia, Henry Dunant, Théodore Maunoir et Gustave Moynier, et devient rapidement le Comité international fondateur de l’œuvre de la Croix-Rouge (CICR).

En 1864, Louis part comme représentant du comité auprès de l’armée prussienne, afin de déterminer les possibilités d’applications pratiques des Résolutions de Genève établies en octobre de l’année précédente. Il publie un rapport après son retour, qui montre l’importance du concours des comités de secours civils. Pendant cette guerre du Schleswig-Holstein, Louis mit encore son esprit humanitaire au service des blessés de guerre. En 1865, Louis Appia et Gustave Moynier publient La Guerre et la Charité, ouvrage couronné par le Comité central prussien de secours pour les militaires blessés.

En juillet 1866, Louis repart en l’Italie, pour aller s’occuper des blessés de la bataille de la Bezzecca. Il y est avec son frère Georges et d’autres volontaires. C’est à cette occasion qu’ils rencontrent Garibaldi qui les remercie chaleureusement pour leur action. En rentrant il publie un ouvrage racontant ses souvenirs.

En 1869, Clara Barton, l’égérie des militaires blessés américains, vient en Europe se refaire une santé. Louis Appia la rencontre et l’accompagne auprès de l’armée allemande. Cette amitié profonde est attestée par une correspondance dans laquelle Appia, soutenu par Gustave Moynier, réussit à convaincre les Etats-Unis de fonder une Croix-Rouge américaine.

A la fin d’octobre 1872, Appia quitte Genève pour l’Egypte, car il désire obtenir l’adhésion de l’Egypte à la Convention de Genève et ouvrir un hôpital ophtalmologique pour soigner le glaucome qui frappe durement la population locale. Mais malheureusement le khédive Ismaïl Pacha se dérobe, car son pays est le vassal de l’Empire ottoman. Cet échec et les problèmes de santé de son épouse le firent rentrer.

Pendant les années qui suivirent, Louis Appia a continué à mettre son expérience au service du Comité international de la Croix-Rouge, que se soit en participant  diverses conférences de la Croix-Rouge ou par son activité lors d’un grand nombre de voyages afin de militer pour la convention de Genève et le travail du comité international.

Louis Appia décéda le 1er mars 1898 à Genève, oublié et solitaire dans son appartement de la rue Calvin. Il fut enterré dans le cimetière de Saint-Georges. Aucune pierre ne devait, selon son expresse volonté, marquer la place de sa tombe. Mais la simplicité, l’ardeur et la fermeté de son attachement sincère à une grande idée, laissèrent une trace qui ne s’effaça pas.


Biographie sur Louis Appia : Roger BOPPE, L’homme et la guerre. Le docteur Louis Appia et les débuts de la Croix-Rouge, Genève et Paris, J. Muhlethaler, 23 mars 1959.


Anne-Caroline Appia-Lasserre